Les écoles du Val-d’Oise au bord de la crise de nerfs

Alors que les cas de Covid-19 se multiplient à grande vitesse au sein des établissements, la vie scolaire se vit désormais en pointillé, entre les classes fermées, et celles qui se retrouvent sans enseignant.

 A Parmain, l'école maternelle Maurice Genevoix s'est retrouvée sans enseignant. Tous étant cas Covid ou contact, les 134 élèves ne pouvaient plus avoir classe. La mairie avait dû embaucher des animateurs pour accueillir les enfants.
A Parmain, l'école maternelle Maurice Genevoix s'est retrouvée sans enseignant. Tous étant cas Covid ou contact, les 134 élèves ne pouvaient plus avoir classe. La mairie avait dû embaucher des animateurs pour accueillir les enfants. LP/Marie Persidat

    Des enseignants à bout, des parents sur les dents... Et des enfants souvent privés d'enseignement. Toute la communauté scolaire du Val-d'Oise n'échappe pas à la déferlante de l'épidémie depuis quelques semaines, et en particulière ces derniers jours.

    Les chiffres parlent d'eux-mêmes. Actuellement dans le premier degré, au moins 188 classes seraient fermées (89 pour des raisons sanitaires, 99 par manque d'enseignants). Six écoles ont d'ailleurs complètement baissé le rideau. Au collège, la fermeture de 33 classes était actée en fin de semaine. Mais tous ses chiffres doivent déjà être revus à la hausse ce lundi, le maire de Fosses par exemple ayant décidé de fermer la totalité des maternelles et élémentaires pour sept jours.

    La semaine dernière dans le département, 872 cas de Covid-19 ont été confirmés chez les élèves (384 dans le premier degré, 488 dans le second degré) et 117 au sein des personnels. D'après la FCPE Val-d'Oise, qui vient d'être reçue en urgence par la préfecture, beaucoup plus de cas qu'avant sont détectés chez les 0-9 ans, asymptomatiques. Le variant anglais correspond à la majeure partie de ces chiffres en forte augmentation.

    Et pour ceux qui restent, les conditions sont souvent loin d'être normales. « Le problème, c'est qu'entre les cas de Covid et les cas contacts, il n'y a plus de personnel pour accueillir les élèves, s'alarme Mathieu Moreau, de la CGT Educ'Action. C'est un accueil très artificiel qui est maintenu. »

    Et cette politique accentuerait encore la propagation de l'épidémie d'après les enseignants. « Dans le collège, quand un enseignant est absent il y a des regroupements de classe. Au collège, tous les élèves se retrouvent à la vie scolaire quand ils n'ont pas cours. Tout cela augmente beaucoup le brassage. »

    Aujourd'hui, les enseignants ne se sentent plus du tout en sécurité, et les cris d'alerte se multiplient aux quatre coins du département. Toute l'équipe du collège Utrillo à Montmagny a rédigé vendredi dernier une lettre pour « appeler à l'aide. » Six classes de l'établissement ont déjà dû fermer : le personnel décrit « une augmentation exponentielle du nombre de cas » et fait part de son découragement.

    « Nous avons œuvré au maximum contre la propagation du virus. Sédentarisation des classes, limitation du nombre d'élèves ensemble dans la cantine, demi-groupes en cours d'EPS, application des gestes barrière...» Et pourtant plus rien ne semble pouvoir empêcher l'épidémie de progresser dans ce collège où 9,5 % d'élèves ont déjà été touchés et mis en isolement (cas contacts inclus), le taux de positivité s'élevant à 7,5 %. Les membres de l'équipe éducative réclament « une fermeture de l'établissement pour rompre la chaîne de contamination. »

    À Saint-Leu-la-Forêt, une professionnelle s'insurge. « Nous en sommes à 23 cas Covid dont 6 adultes, les 5 classes ont été fermées une à une puis rouvertes, des cas Covid continuent de se déclarer et la directrice vient d'être infectée. La situation est intenable », raconte-t-elle. « Cette semaine une seule professeur titulaire sera présente sur toute l'école. Nous sommes tous à bout, épuisés, et allons travailler la peur au ventre au milieu du variant anglais avec des enfants non masqués et brassés par manque de remplaçants ! »

    Comme un écho à cette situation qui devient intenable, les parents d'élèves ne cachent plus leur angoisse. « Depuis une semaine, nous avons tellement de remontées du terrain que nous avons demandé un rendez-vous d'urgence », explique Philippe Renou, vice-président de la FCPE Val-d'Oise. Le syndicat a été reçu vendredi par la préfecture, la directrice académique et la déléguée départementale de l'ARS.

    Pour préparer ce rendez-vous tout à fait exceptionnel, le syndicat avait lancé un sondage auprès de ses adhérents, « en un jour et demi, nous avons reçu 250 réponses », s'étonne encore Philippe Renou. « Cela montre à quel point les gens sont à cran. » Ont été évoquées toutes les difficultés rencontrées par les parents noyés au milieu des fermetures brutales de classes, obligées de récupérer leur enfant quand la cantine est fermée, et malgré tout obligés de continuer à travailler.

    Et les annonces du ministre Jean-Michel Blanquer vendredi n'ont guère calmé la grogne. « La fermeture des classes dès le premier cas Covid ne va pas arranger la situation », confie la FCPE. « Le nombre de classes fermées va exploser et cela va encore retomber sur les familles qui vont avoir des problèmes logistiques de garde d'enfants. »

    Les enseignants ne sont guère plus convaincus par cette « demi-mesure », comme la décrit Mathieu Moreau. « Passer en demi-jauge dès le premier degré et au collège, cela serait une vraie annonce qui limiterait le brassage », estime le représentant CGT Educ'Action.