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Apprentissage : les grands axes de la réforme

Le premier ministre a présenté vendredi des mesures qui changeront radicalement la logique du dispositif.

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Publié le 09 février 2018 à 12h26, modifié le 10 février 2018 à 10h08

Temps de Lecture 5 min.

Edouard Philippe et Muriel Pénicaud, à Paris, le 9 février.

Après la rĂ©Ă©criture du code du travail, le deuxième gros chantier social du gouvernement commence Ă  prendre tournure. Vendredi 9 fĂ©vrier, le premier ministre Edouard Philippe et la ministre du travail Muriel PĂ©nicaud ont dĂ©voilĂ© les grandes orientations de la rĂ©forme de l’apprentissage, l’un des trois volets d’un projet plus global visant Ă  sĂ©curiser les parcours professionnels de tous les actifs – les deux autres portant sur la transformation de l’assurance-chĂ´mage et de la formation continue. L’occasion, pour le gouvernement, d’annoncer une vingtaine de mesures qui modifient en profondeur la gouvernance du système, son financement et les règles applicables aux apprentis.

Les mots d’ordre de l’exĂ©cutif ont dĂ©jĂ  Ă©tĂ© entendus sous de prĂ©cĂ©dentes lĂ©gislatures : il faut dĂ©velopper l’apprentissage car cette filière affiche de bons rĂ©sultats en termes d’accès Ă  l’emploi. Sept jeunes sur dix qui vont au bout de leur contrat trouvent un poste six mois après. Or le nombre de nouveaux entrants dans le dispositif plafonne : un peu plus de 296 000 en 2017, soit un niveau très lĂ©gèrement supĂ©rieur Ă  celui relevĂ© dix ans plus tĂ´t.

Financement chamboulé

Pour sortir de cette langueur, le gouvernement considère qu’il faut mettre fin Ă  la logique « administrative Â» qui a prĂ©valu jusqu’à prĂ©sent. A l’avenir, un centre de formation d’apprentis (CFA) pourra ouvrir sans requĂ©rir l’imprimatur des conseils rĂ©gionaux (ou, dans quelques cas, de l’Etat) : le but est de rĂ©pondre plus promptement aux besoins en compĂ©tences exprimĂ©s par les patrons. Une libĂ©ralisation rĂ©clamĂ©e de longue date par les instances nationales du Medef, mais qui inquiète les rĂ©gions. Elles redoutent que les CFA nouvellement crĂ©Ă©s entrent en concurrence avec des lycĂ©es professionnels (LP) situĂ©s Ă  proximitĂ© et proposant des cursus similaires.

Afin d’éviter cet Ă©cueil, elles continueront de jouer un rĂ´le rĂ©gulateur, Ă  travers un « schĂ©ma rĂ©gional Â», cosignĂ© avec les branches professionnelles – qui reprĂ©sentent le monde de l’entreprise, secteur par secteur. Ce « schĂ©ma Â» livrera une estimation, pour plusieurs annĂ©es, des formations Ă  assurer sur des mĂ©tiers donnĂ©s et fixera une prĂ©vision d’investissements au profit des CFA. Attention, souligne-t-on dans l’entourage de la ministre du travail, Muriel PĂ©nicaud : il ne s’agit pas de maintenir la « gestion malthusienne Â» qui règne aujourd’hui ; le principe de libre crĂ©ation du CFA est bel et bien inscrit au cĹ“ur de la rĂ©forme.

Réunion sur la réforme de l’apprentissage (de g. à dr.) : Frédérique Vidal, ministre de l’enseignement supérieur, Muriel Pénicaud, ministre du travail, Edouard Philippe, premier ministre, Thomas Fatome, directeur de cabinet adjoint d’Edouard Philippe, et Jean-Michel Blanquer, ministre de l’éducation nationale.

S’agissant du financement, tout est chamboulĂ©, lĂ  aussi. La taxe d’apprentissage, dont 51 % Ă©tait reversĂ©e aux rĂ©gions, va ĂŞtre remplacĂ©e par une « contribution alternance Â» en faveur des contrats d’apprentissage et des contrats de professionnalisation. Le produit de ce prĂ©lèvement, Ă©gal Ă  0,85 % de la masse salariale des sociĂ©tĂ©s (soit un peu plus de 4 milliards d’euros), redescendra intĂ©gralement vers les CFA, en fonction du nombre de contrats signĂ©s avec des jeunes.

Un bouleversement majeur qui favorise les centres de formation dynamiques, en adĂ©quation avec les besoins des employeurs, estime-t-on dans l’entourage de Mme PĂ©nicaud. Mais certains CFA, dont l’équilibre financier Ă©tait tributaire de subsides allouĂ©s par les rĂ©gions, risquent d’en faire les frais et d’être contraints de mettre la clĂ© sous la porte.

Rémunération en hausse

Les conseils rĂ©gionaux ne sont pas entièrement dĂ©pouillĂ©s, contrairement Ă  ce que certains scĂ©narios pouvaient laisser supposer initialement. Ils conserveront une toute petite fraction de la « cotisation alternance Â» (environ 250 millions d’euros), notamment pour soutenir des CFA implantĂ©s dans des zones rurales et dans des quartiers relevant de la politique de la ville. Et une part de la TICPE (taxe intĂ©rieure sur la consommation de produits Ă©nergĂ©tiques) leur sera octroyĂ©e, Ă  hauteur de 150 millions. Ce sont eux, par ailleurs, qui distribueront aux entreprises les aides Ă  l’apprentissage, en vertu d’une procĂ©dure beaucoup plus lisible : Ă  l’heure actuelle, il existe trois subventions Ă  l’embauche et un crĂ©dit d’impĂ´t ; ces lignes de financement seront unifiĂ©es, de manière Ă  en faciliter l’accès pour les employeurs.

Dans le but d’accueillir un plus grand nombre de jeunes dans les CFA, plusieurs mesures incitatives sont prises – la plus frappante Ă©tant l’aide de 500 euros attribuĂ©e aux apprentis majeurs pour passer le permis de conduire. Un coup de pouce qui cherche Ă  rĂ©pondre aux difficultĂ©s rencontrĂ©es par les intĂ©ressĂ©s pour gagner leur lieu de travail ou leur centre de formation. La rĂ©munĂ©ration des 16-20 ans, en apprentissage, sera par ailleurs revue Ă  la hausse (en moyenne, de 30 euros nets par mois).

Le temps de travail pourra ĂŞtre portĂ© Ă  40 heures par semaine

Autre disposition très importante : les apprentis, dont le contrat est interrompu avant terme (ce qui arrive dans un plus peu d’un quart des cas), auront le droit de prolonger pendant six mois leur formation au sein du CFA. Jusqu’à maintenant, une telle possibilitĂ© ne leur Ă©tait pas offerte et ils perdaient une annĂ©e, mentionne-t-on au ministère du travail.

Le gouvernement s’engage vis-Ă -vis des familles et de leurs enfants Ă  faire la « transparence Â» sur la « qualitĂ© Â» des formations offertes : seront ainsi rendus publics les taux d’insertion dans l’emploi et de rĂ©ussite pour obtenir un diplĂ´me, pour chaque CFA et pour chaque lycĂ©e professionnel. Des donnĂ©es seront aussi mises Ă  disposition sur les rĂ©munĂ©rations pratiquĂ©es. L’objectif est de permettre aux jeunes de choisir leur filière, « de façon documentĂ©e et Ă©clairĂ©e Â». Dans l’optique, toujours, d’élargir l’ouverture au système, celui-ci aura la possibilitĂ© de prendre en charge des personnes jusqu’à 30 ans – contre 26, sauf exception, aujourd’hui.

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Des mesures sont prĂ©vues pour « lever les freins Â», liĂ©s Ă  la rĂ©glementation, et encourager les patrons Ă  « s’engager dans l’apprentissage Â». Ainsi, le temps de travail maximum pourra ĂŞtre portĂ© Ă  40 heures par semaine dans certains secteurs, comme le bâtiment ou les travaux publics, la rĂ©munĂ©ration Ă©tant majorĂ©e au-delĂ  du seuil de 35 heures ; la lĂ©gislation sur les horaires de travail sera Ă©galement assouplie chez les boulangers-pâtissiers.

Un employeur aura par ailleurs la facultĂ© de recruter Ă  n’importe quel moment, ce qui constitue une autre nouveautĂ© de taille. Aujourd’hui, dans l’immense majoritĂ© des cas, c’est le cycle scolaire qui cadre la pĂ©riode d’embauche – le plus souvent sur le dernier quadrimestre de l’annĂ©e civile. Enfin, si une entreprise souhaite rompre un contrat d’apprentissage, elle n’aura plus Ă  saisir les prud’hommes, alors qu’elle y est tenue, actuellement, au bout de 45 jours de prĂ©sence du jeune en son sein.

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