Lorsque vient l’heure du grand saut, chacun l’aborde à sa manière. Certains, fonceurs ou téméraires, plongent tête la première. D’autres jaugent le bassin avec appréhension et ne diraient pas non à un temps de répit avant de s’immerger totalement dans le grand bain. A écouter les inquiétudes des étudiants en dernière année d’études supérieures, la métaphore illustre bien ce moment charnière où les uns et les autres doivent, de gré ou de force, quitter la vie étudiante et se lancer sur le marché du travail.
Iris admet volontiers faire partie de la deuxième catégorie : « C’est clairement pour retarder la fin de mes études que je me suis lancée dans une thèse », raconte la jeune femme. La doctorante en informatique médicale à Paris a commencé son cursus par une classe prépa, au sortir de sa terminale scientifique. « A l’issue des concours, j’ai été prise à l’Ensta ParisTech, une école d’ingénieurs, et j’y suis donc allée sans me demander une seule fois ce que j’avais envie de faire », poursuit la jeune femme de 23 ans. Alors, une fois son diplôme d’ingénieur en poche, impossible pour elle de se projeter.
Cette problématique est très prégnante parmi les étudiants admis dans des écoles sélectives. « Pendant leurs années de classe prépa, parents et professeurs leur ont fait comprendre qu’ils n’avaient pas besoin de choisir, que le doute n’avait pas sa place à cet instant T et qu’ils devraient seulement réussir “le plus dur et le plus prestigieux”, observe Anne Delaigue, psychologue à l’Ecole polytechnique. C’est donc très brutalement que ces questions se posent dès l’arrivée à l’école : Qui suis-je ? Pourquoi suis-je là ? Qu’est-ce que je veux vraiment faire ? » A la fac, ce moment du choix apparaît particulièrement en début de master 2, après des années d’un cursus poursuivi comme une continuité, « sans forcément envisager un métier en bout de course », souligne Marilène Callegari, psychologue à l’université Paris-Diderot.
La quête du « métier idéal »
Pour beaucoup d’étudiants, c’est alors le grand flou et l’angoisse qui surgissent. « En commençant Sciences Po Bordeaux, je me suis simplement fié au dicton “le plus dur, c’est d’y entrer”. J’ai validé mes années les unes après les autres. A la fin, la question de l’insertion professionnelle s’est brutalement présentée », abonde Pierre, étudiant en master 2 qui, arrivé en fin de cursus, ne parvient toujours pas à envisager un métier dans lequel il s’épanouirait.
Il vous reste 66.21% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.